1894 : Les Moteurs à Alcool - début d'une longue série

Les Moteurs à Alcool, communication à la Société nationale d'Agriculture.

On remonte dans le temps : un article de 1897 relatant des expériences depuis 1894.

Cet auteur s'enflamme un peu trop sur les risques d'incendie par l'alcool par rapport à l'essence de pétrole, c'est plutôt le contraire.

J'ai l'honneur de communiquer à la. Société ; les résultats généraux de la première partie de mes recherches sur les conditions de l'utilisation de l'alcool à la production de la force motrice.

La Société d'agriculture de Meaux, présidée par notre honorable confrère, 'M. J. BÉNARD, avait mis à ma disposition les crédits nécessaires à ces expériences qui, par autorisation spéciale, ont été effectuées à la Station d'Essais des Machines agricoles.

Relativement à l'essence minérale, l'alcool émet peu de vapeurs à la température de 15 à 20 degrés; voici d'ailleurs quelques chiffres parmi les résultats obtenus :

Ces chiffres indiquaient qu'il fallait procéder aux recherches sur un moteur à essence minérale : le type que j'ai adopté est un moteur horizontal de 2 à 3. chevaux, du cycle à 4 temps, à allumage électrique et à soupapes automatiques construit par M. BROUHOT, de Vierzon (Cher).

Le moteur ne peut pas partir seul avec l'alcool, ce combustible émettant trop peu de vapeurs à la température de 15 à 20 degrés ; mais il ne faut pas songer à réchauffer le vaporisateur par une lampe extérieure: il y a trop de dangers d'incendie.

J'ai tourné la difficulté en faisant fonctionner pendant cinq minutes environ, le moteur avec l'essence minérale, et, lorsque la température moyenne des gaz de la décharge atteint 70 degrés environ, on commence l'alimentation à l'alcool, en ayant soin de modifier la composition du mélange tonnant  (pour le même volume d'air introduit par la soupape d'admission il faut plus de vapeurs d'alcool que de vapeurs d'essence, afin d'obtenir un mélange tonnant à combustion complète).

Voici les résultats principaux, à la puissance d'environ 2 chevaux-vapeur ou de 1,5 poncelet (@reno50 => unité de mesure de puissance égale à cent kilogrammètres par seconde) ;
je mets en regard les chiffres obtenus, avec la puissance donnée par le moteur Merlin, dans nos essais du. Concours international de Meaux, en 1894.

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Ainsi, à l'heure actuelle, les rapports des dépenses des combustibles pour obtenir la même puissance, sont :

• Moteur à pétrole lampant.: 1 franc ;
• Moteur à essence minérale 3 fr. 95 ;
• Moteur à alcool 10 fr. 50.

Je compte vérifier prochainement ces chiffres, sur un moteur de trois quarts de cheval du système BENZ, que M. BARBIER a promis de mettre à ma disposition ; j'ai lieu d'espérer que j'arriverai à faire fonctionner ce moteur après une mise en train à l'essence minérale, si toutefois l'allumage par incandescence, dont est pourvu ce moteur, ne me donne pas des explosions anticipées avec les vapeurs d'alcool.

Au point de vue de la calorimétrie, 1 kil. 570 d'alcool absolu donnent la même quantité de chaleur que 1 kilogramme de pétrole lampant.

Donc, la question se résume ainsi : le jour où les 157 kilog. d'alcool dénaturé seront vendus, en France, au même prix que les 100 kilog. de pétrole, il y aura lieu de se préoccuper des moteurs à alcool. Aux cours actuels de Berlin (29 fr. les 100 kilog.), les 157 kilog. d'alcool, représentant 45 fr. 53 ne peuvent lutter contre lés 100 kilog. de pétrole valant 22 francs en Allemagne et 35 francs dans notre pays.

Avec les résultats des essais ci-dessus l'alcool devrait être vendu à raison de 10 francs l'hectolitre pour être équivalent, au point de vue économique, au pétrole lourd valant 30 francs l'hectolitre.

Il est possible que de prochains essais modifient légèrement les chiffres relatifs à la consommation de l'alcool; mais il me paraît désormais acquis qu'il ne faut pas songer à l'utilisation économique de ce combustible, pour la mise en marche des moteurs, surtout si l'on tient compte des dangers d'incendie qu'entraîne la manipulation d'un liquide aussi facilement inflammable.

MAXIMILIEN RINGELMANN

Ingénieur agronome.

BNF : Le Chauffeur 1897